Marie-Françoise Bonicel, mis en ligne le 17 avril 2013.
Mots-clés: Thématiques: Cadre . Formation. Autorité. Vie de groupeL’école est en effet une communauté humaine, et comme telle, traversée par la violence interne à chaque individu, aux groupes sociaux qui la composent et à sa propre violence institutionnelle. Organisme vivant et poreux, elle est aussi contaminée par la violence endémique externe, celle qui cristallise la difficulté du « vivre ensemble » des institutions, des groupes sociaux ou des nations Mais alors que nous nous escrimons à élaborer de nouvelles cartes, nous persistons à les lire avec dans nos têtes des modèles anciens.
La formation des enseignants est un des facteurs qui peuvent contribuer à repérer cette violence, à l’affronter et à transformer cette énergie destructrice en levier pour l’action et le changement.
Est-ce la violence à l’Ecole qui augmente, ou notre inquiétude devant ses manifestations nouvelles et de plus en plus précoces sur un terreau familial et social fragilisé ? Comment, sinon éradiquer, du moins contenir cette la violence ?
La psychanalyse nous a permis de comprendre les mécanismes de cette violence fondamentale qui est au cœur du petit enfant englué dans l’amour et la haine, l’illusion de la toute puissance infantile et le principe de plaisir. Si la violence a ses raisons internes, elle s’inscrit cependant pour chacun, dans une relation complexe avec son environnement.
La violence est contagieuse et s’auto-alimente de blessures en blessures, elle s’avance masquée avant de faire irruption brutalement dans les lieux de vie de l’enfant, et notamment l’école.
Elle se déploie dans une spirale de blessures reçues et données et l’élève qui vit dans une société au repères défaillants, trop souvent sans personne en face de lui, va exprimer en réponse son agressivité incontrôlée dans l’explosion externe qui devient un mode d’action ( taxages, coups, injures , désir d’imposer sa loi à ses pairs). Ou dans l’implosion avec son cortège de symptômes de dévalorisation de soi, de stratégies d’échecs ou de somatisations qui à l’adolescence peuvent aller vers les pathologies addictives ou le suicide, et qui chez les plus jeunes s’exprime dans des jeux dangereux .
L’anthropologie et l’histoire quant à elles, nous ont appris comment la violence depuis la genèse de l’humanité s’est canalisée dans la construction du langage, civilisée dans l’édification de règles et de lois communes, choisies ou imposées qui s’imposent en tiers contre le chaos de l’indifférenciation, conquête jamais achevée.
La complexité des causes, du contexte, de l’évolution de la société suppose d’aborder ce phénomène sur tous les fronts. Nous ne poserons ici que des pistes sur ce que la formation aux relations humaines des enseignants peut apporter comme étayage et comme contribution
Comment en tant qu’enseignant contribuer à utiliser ce formidable réservoir de vie que constitue la violence ? Comment explorer d’autres manières de faire, d’être, et modifier sa représentation du monde en libérant de l’énergie pour l’action et le changement ?
Les enfants sont en difficulté dans les différents champs de leur vie, difficultés qui sont un terreau fertile pour la violence. Parmi ces défaillances, nous pouvons repérer :
« Soyez-vous même le changement que vous voudriez voir dans le monde" - Gandhi
La tâche est immense pour affronter ces situations qui font obstacle à la mission que les enseignants ont reçu, de transmettre du savoir. Le temps n’est plus aux combats d’arrière garde sur les tenants du savoir et ceux de la pédagogie. C’est que pour transmettre ce savoir, sauf situations rares et privilégiées, les enseignants ne peuvent qu’être aussi des éducateurs et pour cela se former aux relations humaines afin de restaurer une culture du lien pour une école apaisée.
Je préciserai volontiers que ceux qui ont à se former, ce sont tous les acteurs de l’école, enseignants, personnels éducatifs ou de santé, chefs d’établissement ou personnels d’accueil, et bien sûr, les élèves, même si nous mettons l’accent ici sur les enseignants.
Quand nous voyons la liste sans doute incomplète des difficultés rencontrées par les élèves, nous constatons qu’elles sont aussi celles des enseignants eux-mêmes (travailler en coopération, vivre la hiérarchie, déficit de reconnaissance et d’image de soi etc.) tandis que d’autres, les moins nombreuses sont plus spécifiques (exercer son autorité, sanctionner…)
Si la posture de l’enseignant est bien asymétrique, il s’agit pourtant d’un travail d’alliance pour que chacun remplisse sa mission, éducative pour l’un, d’apprenant pour l’autre. « L’élève n’est pas un vase qu’on remplit, mais un feu qu’on allume » écrivait Bachelard. Mais comment entretenir « ce feu » là quand on est mobilisé par l’anxiété quotidienne d’une classe « à tenir » et non à faire vivre ?
Pour aller dans ce sens, l’enseignant peut renforcer ses compétences dans différentes directions.
La porte du changement ne s’ouvre que de l’intérieur - Carl Rogers
La formation est comme le travail de la terre, elle se fait dans la durée avec des temps forts et des temps de maturation. Se former :
Sur le « Comment monter des formations » ? on se référera notamment au livre de Jacques Nimier et à son site référencé.
Nous avons dans diverses publications, fait des retours sur des pratiques de formation. Dans un article intitulé « Une utopie à réalisation vérifiable au Luxembourg »9 où nous avons fait une relecture d’une expérience de plusieurs années- et elle dure encore – de formation à la communication relationnelle inspirée de l’approche de Jacques Salomé associée à d’autres courants.
L’utilisation des principes de la méthode E.S.P.E.R.E du psychosociologue Jacques Salomé,10 consacrés à la communication relationnelle y a apporté des outils efficaces pour permettre de travailler les représentations, les différenciations entre les comportements et les personnes, le repérage des systèmes destructeurs, en les remplaçant par des relations plus créatrices entre adultes et entre les enfants. Cet ensemble a le mérite de fournir tout un ensemble constitué de règles d’hygiène relationnelle, d’ outils favorisant la mise en place d’une communication efficace et des concepts structurants la relation que nous offrons à l’autre pour le quotidien de la vie et pour l’école.
"Quand on a mission d’éveiller les enfants au désir d’apprendre, il importe que les enseignants puissent faire de l’école un laboratoire d’expérience pour une culture de la non-violence, pour apprendre à vivre ensemble« non pas pour avoir la paix, mais pour permettre de vivre en paix" (Philippe Meirieu).
Source : Revue de pédagogie du Quebec ( AQUEP " Vivre le primaire" ), 2008
Des sites à consulter
Et la riche Rubrique "Prévention de la violence" référée ci-après.
» Et après ?.. Qu’en est-il de l’école ?
» La violence à l’école et école de la violence
» Armen TARPINIAN—Le désir d’apprendre et la joie d’enseigner. Finalités et Valeurs de l’école
» Violence es-tu là ?
» Eduquer à la non-violence et à la paix
» Transformer la violence des élèves
» La violence est le symptôme d’une crise de la sociabilité
» Un outil pédagogique pour encourager l’estime de soi et le respect des autres
» Prévenir la violence à l’école. Suède, Finlande, Canada… des modèles pour la France ?
» Eduquer "l’agressivité" pour répondre et prévenir les violences entre élèves
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» "Non-Violence Actualité"
» 100 questions-réponses pour éduquer à la non-violence
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